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« Tous protégés par le droit d’auteur » !

Télérama, cette semaine, titre en couverture : « Tous photographes ». Un épais dossier évoque les nouvelles pratiques photographiques fondées sur l’usage des téléphones portables et des réseaux sociaux du net, pratiques très largement répandues, d’où le titre de l’hebdomadaire.

En ces temps où des voix s’élèvent pour affirmer que la photographie ne doit plus être protégée par le code de la propriété intellectuelle, qu’elle ne doit, donc, plus être considérée comme « œuvre de l’esprit », il est intéressant de lire ce dossier, tout en sachant que cette question n’en est pas le sujet.

D’entrée de jeu, Luc Desbenoit, rédacteur de l’article de tête, évoque : « Un nouveau langage visuel qui s’invente tous les jours ». Il écrit ensuite : « L’image sait dire ce qui échappe aux mots ».

Le meilleur est plus loin : « Bonne ou pas bonnes, leurs photos ? Peu importe (…) ce qui fascine (…) c’est  la manière dont les usagers se réapproprient ou redécouvrent tous les mouvements de l’histoire de ce médium : pictorialisme, recherche de l’instant décisif à la Cartier-Bresson, photographie humaniste pratiquée dans les rues (...) photo intime (...) » Et d’invoquer, tout à trac, quelques uns des plus grands noms de la photographie.

Propos illuminés d’un journaliste isolé ? Son confrère Olivier Tesquet enfonce le clou. En signant l’article suivant consacré à Instagram, première plateforme de partage de photos racheté par Facebook, en 2012, il écrit : « Instagram a sa grammaire (…) possède son propre langage ». Il précise : « Nous passons notre temps à projeter notre singularité dans des photos similaires (...) ». Et plus loin : « notre subjectivité s’exprime par le rattachement de notre “œuvreˮ à un corpus plus vaste. »

Difficile, après cela, d’affirmer que la photographie ne serait que la captation mécanique du réel ! Difficile de contester que les photographies expriment bel et bien la personnalité de leurs auteurs !

Mais alors, que devient le droit d’auteur ? Luc Desbenoit expédie la question en une phrase, au demeurant jolie et malheureusement très juste : « La notion de droit d’auteur s’est volatilisée ». On ne lui en fera pas grief, ce n’était pas son sujet.

Pour l’UPP la chose est simple : au « Tous photographes » de Télérama, nous ajoutons : « Tous protégés par le droit d’auteur » !

Que ce droit n’entraine pas rémunération lorsqu’il y a usage « social » des images ne nous choque pas. En revanche, il ne faut pas se voiler la face : Instagram, Facebook drainent des budgets publicitaires considérables sur le dos des contributeurs.

Nous pensons que l’usage d’une photographie, quel que soit le statut de son auteur, amateur ou professionnel, doit s’accompagner d’une rémunération dès lors que l’utilisateur en tire un profit, commercial, promotionnel ou publicitaire. C’est le bon sens près de chez soi.

Concernant les photographies évoquées par Télérama, il est sans doute impossible, aujourd’hui, de les rémunérer à l’unité en fonction du chiffre d’affaire des grands opérateurs du net. En  revanche, mettre à contribution ces mêmes opérateurs pour alimenter une caisse de soutien à la création serait une simple mesure d’équité publique, pour que l’image puisse continuer de dire « ce qui échappe aux mots ».

Juin 2013